ALI-Provence

SÉMINAIRE DE VAUCLUSE ALI PROVENCE – L’Identification. Jacques Lacan – D’après les leçons 6 et 7.

CARPENTRAS ; 4 janvier 2021

Du petit Hans à Herbert Graf,

Comment la lettre vient à point nommé, faire fonction de nomination dans l’insconcient.

Lacan fait état de deux propositions : celle du nom propre et de la nomination.

Par ce qui apparaît comme une différence fondamentale entre l’un et l’autre.

Là où il est dit que la répétition prend la forme de A, il y a le surgissement d’un numéro tant.

D’un comportement réitéré, correspond un certain numéro adéquat.

Que faut il entendre ?

Quand nous disons A, nous écrivons A, nous sommes à la lettre, la première de l’alphabet chiffrée 1, à quoi il faut rajouter que ce que nous entendons, nous l’écrivons d’une façon, mais nous le prononçons d’une autre.

L’alphabet (Alpha-Beth) est fait de lettres, qui diffèrent toutes entre elles, mais toutes sont des lettres, ce qui intervient dans l’ordre comme différence serait ce qui ordonne une place à chacune : le numéro tant.

Ainsi au tirage au sort, si je tire A, je ne tire pas B ni C.

Pour illustrer le propos, j’imagine une chaise, quelque soit la forme, une chaise est une chaise et je la nomme ainsi, c’est la prévalence du signifiant sur la lettre.

Notant que l’objet est nom commun et de ce fait ne s’impose pas vraiment comme nom propre.

Maintenant, si je dis cette chaise est une Starck, et bien le nom propre du designer prend le dessus, ce n’est pas n’importe qu’elle chaise c’est une Starck.

Pas n’importe quoi ! Peut être même plus une chaise …rappelez vous Magritte « ceci n’est pas une pipe », différence donc entre ce qui se voit et ce qui se dit.

Equivoque qui vient confronter le sens et le hors sens…

Que viendrait différencier alors une Starck d’une autre Starck ?

Sa place dans la production d’une répétition usinée, au bout de la chaine de production sort la Starck 1, la Starck 2 la Starck 3 ….à l’image des numéros de séries inscrits sur les objets dit de valeur.

A cela, on peut encore rajouter que Starck est un Nom et aussi….une marque….une marque déposée, ce qui nous ramène au trait unaire, à l’encoche et à ce qui fait trace.

Tout ceci pour en venir à ce que Lacan nomme le name en Anglais différencié du noun, ce n’est pas le – je m’appelle Untel, mais bien – mon nom est Untel.

Ce qui change, et c’est primordial, c’est à quoi ça sert, c’est à dire ce qui met en fonction.

Après tout une chaise est chaise mais elle sert finalement bien à quelque chose, à ce que quelqu’un en fasse quelque usage, à proprement parler qu’on s’assoit dessus.

Voilà comment le champs de l’expérience mathématique est réduit à un jeu de lettres, car la chaise Starck, elle se prononce d’un nom qui ex-siste (dépend du dire) avant de s’écrire.

Sur cet exemple que j’ai choisi, Chaise est selon l’étymologie une « prononciation vicieuse du mot chaire » prononcé chê-z.

Car à cela voyez vous, il faut rajouter un certain défaut de langue, ou plutôt défaut de lettre, apparaissant comme pur produit du signifiant.
« Dans le XVIe et le XVIIe siècle, le peuple de Paris, en beaucoup de mots, remplaçait le son de l\’r par celui du z, et cette faute, acceptée par l\’usage, a fini par faire deux mots de chaire et chaise, avec une acception différente. Mais pendant longtemps l\’usage ne les a pas séparé, Molière a dit chaise pour chaire : Les savants ne sont bons que pour prêcher en chaise. (Source Dicocitations) »

On notera au passage d’une langue à l’autre, du français à l’anglais « chair » qui rend hommage au plus pur du signifiant, à la lettre, perdue, volée ou encore… imprononcée.

C’est là toute la question du phonème apportée par Lacan.

On l’aura compris, de la chaine de production pour la fabrication à la chaine signifiante, il y a encore et toujours du signifiant pour un autre signifiant la dessous.

Là où se trace du Sujet.

Filiations …

Nous avons fait un pas, un pas certain, d’une chaise à Starck, de passer ainsi d’un nom commun (chaise) à un nom propre (Starck).

Lacan nous l’amène parfaitement, avec celui que l’on nomme « le petit Hans », l’histoire de cette cure est évidemment très connue, dans ce qu’elle apporte au niveau de la sexualité infantile, mais ce sera sur le tard qu’un lien pourra être fait par Lacan entre le sexuel, le nom propre et la lettre, puisque Hans est un pseudonyme, resté longtemps sous couvert d’anonymat.

De quoi s’agit il ?

Un petit garçon, précisons le, c’est important Hans est un petit garçon, dont le numéro tant (temps) est 5 ans (vous le trouverez d’ailleurs dit ainsi chez les touts petits, quand par exemple pour désigner l’enfant du CP à l’école, on dit :- lui c’est un 6 ans).

La particularité de Hans, est donc aussi sexuée, c’est un garçon, un garçon à qui la mère répond Oui, à la question posée « maman, as-tu toi aussi un fait-pipi ? ».

La mère est donc phallique dans cette famille, phallus considéré comme un attribut du sujet de la référente mère.

Que l’enfant puisse penser sa mère phallique est une chose, que celle ci se révèle à lui ainsi, en est une autre.

Et puis nous avons ce vocabulaire totalement bêtifiant du fait-pipi pour organiser l’organe mâle dans ce qui serait sa fonction, pour le coup purement organique, couvrant ainsi le mensonge de la mère qui elle aussi ma fois, à toute capacité à produire quelques productions d’urine ou de lait, déplacées confusionnelles à tout autre orifice.

Le père d’Hans rapportant  qu’à la vue de la traite d’une vache, son fils remarque: « Regarde, de son fait pipi il sort du lait. ».

C’est prendre des vessies pour des lanternes, et l’enfant pour un imbécile, ce qu’il devient alors par ce qu’on qualifie de ses « bêtises », encombré qu’il est d’un organe déconnecté de son fonctionnel et de la vérité procréative.

A suivre jusqu\’à la naissance d’Anna, la sœur d’Hans, où là encore, c’est une affaire de bêtes et de cigogne.

Je précise sur ce point, que les enfants à qui ont répond par des carabistouilles de ce genre, ont tôt fait de penser leurs parents stupides, peuvent se sentir supérieurs à eux et se retrouvent dans l’impasse d’être élevés par des demeurés qui ont autorité, donc difficiles à dépasser… d’où la question du non savoir et de la jouissance de l’idiot (à propos de la masturbation), à laquelle se campe en quelque place le fantasme.

Je citerai l’exemple de cette petite patiente de 8 ans concernant le divorce de ses parents :

-«  Maman à un amoureux, c’est un secret mais moi je le sait le secret de maman, papa est jaloux de lui, c’est François. Papa a aussi un secret mais pour Julie il sait pas. »

Traduisons les choses ainsi : Maman à un amant qui s’appelle François, Papa n’opère plus comme phallus pour maman, Papa s’essaye avec une autre femme, qui ne le comble pas, qu’il ne peut combler, jaloux de la dépossession par l’amant, il n’est pas amoureux de sa nouvelle relation, mais il fait comme s’il ne le savait pas.

Voilà, l’enfant en connaît un bout sur la vie sexuelle parentale, alors que les parents n’accordent pas la même valeur à une possible sexualité infantile, jugée innocente, improbable ou encore ne pouvant être entrevue qu’à partir d’une sexualité d’adulte.

Sexualité d’adulte, à rappeler au dela de l’amnésie infantile, au dela du refoulement primordial, Lacan nous le rappelle d’un signe PHI.  Φ,  φ

Minuscule et majuscule à l’appui, Grand phi et petit Phi, phallus imaginaire que l’enfant des deux sexes attribue à la mère.

Edifiant dans la phobie du petit Hans avec un rapport préservée à la lettre, la fonction du phallus et ce qui s’attache à la métaphore paternelle.

On notera la place faite à la girafe, animal à long cou, mais surtout à la lumière du nom propre de la Famille GRAF, pas si loin de GIRAFFE en allemand, la lettre G restant d’ailleurs à la même place (disons revenant comme numéro tant 1), alors que le pseudo d’Herbert réinitialise également dans Hans, une lettre majuscule identique.

La lettre muette H, imprononçable donc.

Lettre qui vient frapper de son sceau le signifiant, le rendant tout aussi imprononçable, seulement visible comme 1 trait I.

Signifiant qui viendrait désigner l’Autre, imprononçable tel le nom de Dieu (YHWH) au milieu de tous les autres noms (Adonaï, Elohim, Yahvé, Seigneur, St esprit, L’Éternel)

Tétragramme au refoulement, imprononçable comme signifiant du manque dans l’Autre qui le barre, noté par Lacan.

La fonction de nommer appartient au nom propre, nom qui est en rapport avec les fonctions d’écritures et de signe.

Nom d’identité, qu’à dire propre, du nom le sujet peut aussi  s’en faire tout un symptôme, car ce qui est désigné par le nom propre n’est pas un signifiant qui représente le sujet mais ce qui de lui est imprononçable.

Sur ce mode muet, ou plutôt sourd-muet on peut saluer le travail de monsieur Vives concernant la question du point sourd, où il est fait référence à un point de non savoir dans le savoir, plus précis qu’un point aveugle (où on ne peut voir, donc donner sens) le point sourd fait retour au phonème inaudible (sans sens).

Le point étant vecteur de non sens.

Pour Lacan, le sujet est ce qui se nomme et qui a affaire avec la lecture du trait 1.

Ce faisant, il élabore le principe de limites quand à la loi des séries 1 + 1 + 1 + 1.

Si on considère que la racine carrée de -1 n’existe pas dans le réel, mais dans l’imaginaire, nous obtenons un point limite entre les deux (réel/imaginaire).

Cette même limite est ressentie dans le passage de l’inconscient au préconscient, dans la mesure où la question posée est celle de l’inscription.

Lacan précise le préconscient comme au dehors, c’est à dire au réel, il faut entendre là, le passage de l’insconcient au préconscient comme la possibilité d’une opération qui fait trou.

Soit le sujet dans une fonction d’unité 1, qui s’additionne à son nom.

Lacan procède du nom du père comme fonction nommante, soit ce qui donne un nom.

Il faut comprendre là toute la question de l’identification phallique et le rapport à la fonction et non à la personne du père.

Le nom du père venant pour le sujet à la place d’un nom dans une opération symbolique.

Tout autre est la nomination.

A reprendre l’imprononçable lettre H, Majuscule du pseudo du petit Hans à celle dévoilée d’Herbert, signifiant Behrt (brillant).

Herbert Graff, est devenu un brillant directeur d’opéra, la musique possédant par la tonalité phonétique de la note une valeur de lettre qui vient frapper de son sceau le signifiant, le rendant sous couvert inaltérable.

C’est de cette qualité dite authentique, que le sujet par l’opération de n’Homination, peut faire usage de son nom.

Celle ci a pour fonction de trouer le réel, d’y creuser autre chose par addition au nom propre.

Il s’agit d’un acte qui s’appuie sur le nom pour en faire un certain usage, celui d’ex-sister, ce qui fera dire que le nom du père on peut s’en passer à condition de s’en servir… ce qui renvoie tout droit à la question du nouage.

Le destin pulsionnel d’Herbert Graf, comme on le sait aura quelque peu trouvé une certaine destinée, avec un  Œdipe résolu de façon finalement …ingénieuse.

Danielle Roussel

NB.

Une histoire équine ayant marqué la psychologie sous le nom « d’effet Hans » est survenue  dans la période historique préexistante à la cure du petit Hans …

Il m’a semblé interessant de soulever ce fait datant de 1900, alors que la cure de Hans se situe entre 1906/1908.

La famille Graf et Freud lui même ne pouvant ignorer cette histoire, l’empereur (Guillaume II ayant ordonné une commision scientifique) …

Hans, est décrit tantôt comme un cheval étalon (wikipédia), tantôt comme un cheval hongre selon d’autres sources (ce qui paraît plus probable).